Gabrielle s’était levée à l’aube. Prête en moins de temps qu’il n’en faut, elle avait harnaché sa monture avec méthode avant de s’élancer sur les routes boueuses qui quittaient le village. Son objectif était de rejoindre un village voisin, à moins d’une lieue du pied des montagnes d’Oghma, pour fournir le village en matériau que seul un marchand situé là-bas était à même de fournir. Celui-ci ne comptant pas faire un détour par le village de Saints en raison des nombreux bandits qui entouraient l’endroit, Gabrielle avait été dépêchée pour se charger de la mission. Armée d’une lance issue de la réserve, elle galopait à tout allure à travers la forêt pour parvenir à sa destination au plus vite. Si elle s’organisait bien, elle se savait capable de rentrer avant la nuit avec tout ce qu’on lui avait demandé. Le vent fouettait ses mèches blondes tandis qu’elle serrait les rênes entre ses mains. Elle offrit son visage au vent, fermant les yeux rien qu’un instant pour profiter de cette liberté qui lui plaisait tant, quand elle montait.

Gabrielle n’accorda une pause réelle à son cheval endurant qu’en milieu de matinée. Elle s’arrêta au bord d’un ruisseau qu’elle avait repéré en analysant une carte qu’on lui avait fournie avant son départ. La jeune fille se pencha pour y remplir sa gourde, assoiffée par le voyage. L’eau était glaciale comme elle s’y attendait ; l’hiver de Garreg Mach avait beau être bien plus clément que ceux de Galatea, il n’en était pas pour autant dépourvu de son froid. La blonde glissa ses mains mouillées par le ruisseau dans le confort de ses poches en attendant qu’elle se réchauffe. Si elle avait développé une résistance importante aux températures les plus basses, il aurait été néanmoins parfaitement inconscient de sa part d’omettre des gestes aussi basiques de préservation. C’est lorsqu’elle se retourna qu’elle l’aperçu.

Un bandit.

Il s’était discrètement approché, profitant de l’inattention de celle qui avait des allures de gamine ; l’opportunité était trop belle. Il avait avancé dans la plus grande discrétion, ses pas couverts par le bruit du ruisseau. Son objectif était sans doute de voler le cheval et les vivres de ce qu’il pensait être une enfant sans défense, armée d’une lance bien trop grande pour elle. Il avait presque réussi puisque la monture était détachée de la branche à laquelle Gabrielle l’avait nouée. La surprise est fugace ; l’écuyer se reprend bien vite. Prête à en découdre, elle dégaine sa lance et fanfaronne, fière de son éducation. Quel meilleur moyen d’impressionner dame Rosalina que de défaire un bandit, danger pour le village ? « Pas si vite ! Reposez tout de suite ce lien, » menace-t-elle en tentant de se donner une contenance. Elle referme sa prise fermement sur le manche de la lance, prête à réagir au moindre geste suspect. Le bandit demeure figé, il ne répond pas aux menaces. Gabrielle s’apprête à s’élancer vers lui pour conduire l’assaut quand sort des fourrées deux autres compères venus en soutien, poussant un genre de cri de guerre destiné à lui faire perdre ses moyens. Oh non, se lamente-t-elle intérieurement. Aussitôt, le cheval détaché se cabre et, le brigand ne le tenant pas assez fermement, se défait de l’emprise pour s’enfuir dans la protection de la forêt. Quel fiasco…

Il ne fallut pas plus d’une fraction de seconde à Gabrielle pour se décider. L’ennemi était en surnombre, elle n’avait plus de cheval… il ne lui restait plus qu’une solution. Courir et semer les bandits. Ni une, ni deux, elle rangea sa lance et s’élança dans la direction opposée, se promettant de retrouver sa monture plus tard. Heureusement, l’entraînement qu’elle avait suivi au cours de ces quelques lunes avait forgé un semblant d’endurance chez elle et une certaine maîtrise de son souffle. Elle courut aussi vite qu’elle le pu, prévoyant de se dissimuler au sommet d’un arbre solide dès qu’elle en trouverait un qui puisse soutenir son poids. Le nez en l’air ou derrière elle pour vérifier la position des bandits, elle n’eut aucune considération pour ce qui se passait juste devant elle. C’est lorsqu’elle entendit un BANG sonore qu’elle réalisa son erreur. Elle avait foncé tête baissée contre une plaque métallique qui lui faisait obstacle. Immédiatement, une vive douleur lancina son front blessé. Légèrement sonnée par le choc, elle se ressaisit du mieux qu’elle pouvait pour analyser la situation. La plaque métallique se révélait être une armure intégrale revêtue par ce qui semblait être un homme – elle ne pourrait en être sûre qu’en entendant sa voix. La conclusion était évidente, il s’agissait sans doute d’un complice des bandits qui avait coupé la dense forêt pour espérer l’encercler. C’était chose faite ; les trois autres comparses arrivaient sur le chemin derrière elle et commençait à prendre place, prêt à la détrousser du peu qu’il lui restait. Gabrielle ne comptait pas se laisser faire. Dame Rosalina aurait combattu, ainsi le ferait-elle aussi. Elle ne s’avouerait pas vaincue. Elle dégaina de nouveau sa lance et la brandit en direction de l’homme en armure, puis des trois brigands qui l’attendaient au tournant. « Je n’ai pas peur de vous » déclama-t-elle d’un ton qu’elle voulait impérieux. Surtout, elle ne devait pas montrer qu’elle était terrorisée.

La réponse du bandit en armure déstabilisa Gabrielle, déçue de ne pas être prise au sérieux. Elle ravala sa honte pour froncer les sourcils de plus belle et renforcer son air menaçant, espérant montrer qu’elle était on ne peut plus sérieuse et prête à empaler quiconque s’approcherait d’un peu trop près. Même s’ils étaient quatre contre elle. Même si sa cause semblait perdue sous tous points de vue. Elle ne se laisserait pas détrousser sans réagir, déshonorant ainsi le chevalier qui l’avait prise sous son aile et lui avait fait confiance. Tandis qu’elle réfléchissait à un plan désespéré pour venir à bout de quatre bandits, l’homme reprit les brigands sur leur comportement. Surprise, Gabrielle jeta un regard derrière elle. Les reprenait-il parce qu’il était de son côté ou bien était-il, au contraire, le chef des bandits ? Son attention se reporta de nouveau sur les trois compères qui tremblaient des pieds à la tête, incapable de faire le moindre geste. Ils semblaient terrorisés par l’inconnu en armure. La blonde n’y comprenait plus rien ; dans quelle situation improbable s’était-elle encore fourrée ?

Elle hocha la tête, livide, lorsqu’il lui demanda si elle savait se battre. Au moins savait-elle désormais que l’inconnu était de son côté. Elle prit une grande inspiration avant de serrer les mains sur la lance, à en faire ressortir les jointures de ses doigts fins. Elle était prête, ou du moins le pensait-elle. Elle réalisa que ce n’était clairement pas le cas lorsqu’elle recula tandis que l’homme en armure se jetait comme une bête sur l’ennemi, l’empalant sur le fil de son épée. Un flash du monastère passa devant ses yeux, le choc écarquilla ses yeux. Après un instant d’hébétation, le mouvement des bandits la fit revenir à la réalité. L’un d’eux fonçait sur l’homme en armure en un geste désespéré afin, sans doute, de venger l’ami qui gisait dans son propre sang. L’autre, quand à lui, semblait résigné à prendre en grippe celle qu’il prenait pour une gamine – ennemi le plus faible. Elle esquiva d’un bond sur le côté l’épée abattue sur elle avant de pointer sa lance vers lui. « Fuyez, tant que vous le pouvez encore, » un avertissement inquiet qu’elle espérait soutenu par la vision de la hargne de l’homme en armure. Le brigand eut ce rire nerveux qu’on les gens désespéré, puis il poursuivi le combat. Gabrielle réfléchissait aussi vite qu’elle le pouvait. Comment se sortir de cette situation ? La lance pouvait aisément tuer l’homme mais elle ne voulait pas de ce sang sur les mains. Or, pour le mettre or d’état de nuire, ce n’était clairement pas la meilleure arme. Son regard fouilla frénétiquement les environs tandis qu’elle continuait d’esquiver les assauts lents du brigand. Finalement, une solution s’imposa à elle. Sur le sol, baignant dans le sang, une épée appartenant au bandit empalé. Ni une ni deux, elle courut vers l’épée avant de se retourner pour faire face à son adversaire. Elle esquiva un énième coup de son adversaire qui commençait à fatiguer avant de s’approcher dangereusement de lui pour lui asséner un coup sec sur la tête grâce au pommeau de l’épée. Assommé sur le coup ; la blonde avait une force que l’on ne soupçonnait pas, gagnée grâce à un entraînement acharné. Elle se retourna alors vers son allié temporaire afin de voir où il en était. Cependant, ce ne fut pas lui que ses yeux trouvèrent en premier. Les deux autres brigands gisaient sur le sol ; il y avait tant de sang qu’ils auraient pu se noyer dedans.

Gabrielle recula d’un pas, horrifiée. « Vous avez… » Elle ferma les yeux, dégoûtée par la scène de violence sous son regard. Tout lui rappelait l’invasion du monastère, le cauchemar de ce jour-là. Tout le sang ne pouvait que lui rappeler ce jour là et débloquer en elle des souvenirs qu’elles pensaient enfouis. Elle secoua la tête pour s’en défaire, pour regagner un semblant de concentration. Une idée lui apparu clairement. S’il avait les deux bandits, il allait sans doute… « Vous n’allez quand même pas… » Elle avisa le brigand inconscient sur le sol. Bien sûr. Il allait l’achever.

Gabrielle n’a pas la force de détourner le regard lorsque l'homme s’avance pour achever le dernier opposant. Elle regarde la scène, impuissante. La lame finement aiguisée qui se plante dans la poitrine du brigand assommé. Qui transperce son cœur. Elle voit le filet de sang qui coule des lèvres de l’inconscient, l’ultime sursaut qui l’agite avant qu’il ne repose à tout jamais. Et pourtant, Gabrielle ne s’interpose pas. Pas d’avancée héroïque pour se mettre en travers du chemin de l’homme en armure. Seulement un silence coupable et un regard horrifié devant la violence de l’acte. Mais au fond, peut-être était-elle rassurée que la vie de ce brigand prenne fin. Le Monastère serait plus sûr en son absence, c’était certain. Alors pourquoi avait-elle hésité ? Pourquoi ne l’avait-elle pas tué elle-même au cours du combat ? Tu es lâche, Gabrielle.

Mais ses propres pensées ne comptaient pas.

Comment aurait agi Rosalina ? Comment agi les modèles avant elle ? Ils n’auraient certainement pas cautionné ce genre d’actions. Après tout ils étaient – du moins aux yeux de Gabrielle – des modèles d’héroïsme et de vertu. Tuer peut être nécessaire mais quel honneur à tuer un homme inconscient ? Incapable de se défendre. Alors Gabrielle se ressaisit et prend une inspiration pour se donner le courage dont elle a besoin, avant de se planter devant l’homme en armure telle une enfant capricieuse. « Il était incapable de se défendre. Vous l’avez tué sans lui accorder un combat équitable. » Elle se rend bien compte qu’il n’y aurait pas eu une grande différence mais ne peut s’empêcher de le relever. « Pourquoi m’avoir aidée ? » Car elle devrait désormais vivre avec le poids de la mort de ces trois bandits sur la conscience – ou plutôt la culpabilité de ne pas avoir su achever le dernier elle-même avec honneur. Mais il était plus simple de remettre en question les actions de cet inconnu qui en semblait dépourvu. Elle soutient son regard quelques secondes avec détermination – ou du moins ce qu’elle pense l’être à travers le heaume – avant de le baisser, cédant. Lâche, encore une fois. « Oubliez ma question, c’est idiot. Je vous remercie infiniment pour votre aide. J’apprécie votre geste. » Gabrielle s’écarte du passage tout inclinant légèrement la tête pour appuyer ses remerciements. Qu’elle aurait aimé mieux savoir imiter ses modèles de courage et de bravoure. Pour reprendre, la jeune fille attendait que l’homme anonyme passe devant ; elle suivrait derrière, comme toujours.

Après quelques pas à peine, Gabrielle pile net. « Attendez ! » s’exclame-t-elle. « Mon cheval… Il s’est enfui à cause des bandits. Nous irions plus vite jusqu’au village si nous le retrouvons ! » Elle hésite un instant pour savoir si le cheval supporterait le poids de l’homme en armure en plus du sien avant de conclure que ce serait probablement le cas. La Déesse lui avait accordée le privilège d’un poids léger et la monture était réputée pour son endurance et sa puissance plus que sa vitesse. Après tout, elle devait à l’origine ramener bien des provisions pour le village. De plus, le cheval transportait déjà de la nourriture et des écus, pour payer son mystérieux sauver.

« Vous n’êtes pas sérieux » souffle Gabrielle, incrédule. Mais plus rien n’arrête l’homme en armure qui la devance de quelques pas, bien déterminé à la laisser dans un quelconque village sans doute avant de repartir en chemin. Lorsqu’il mentionne la nuit proche, la blonde croit s’étouffer dans sa surprise. Elle jette un regard au soleil haut dans le ciel afin d’être sûre de ne pas rêver, avant de reporter son regard sur son sauveur improvisé. « Il n’est même pas midi » se contente-t-elle de commenter. Elle s’arrêta un bref instant pour réfléchir avant de rattraper en quelques enjambées – que l’on pourrait sans doute qualifier de bonds – le combattant. « Mon cheval sera parfaitement à même de vous porter, je vous l’assure. J’avais été mandée par le village des Saints pour aller chercher quelques matériaux pour la forge aussi m’ont-ils confié une monture adaptée. D’un bout de métal à un autre, le changement ne sera pas saisissant. » Elle détourne le regard tout en le continuant de le suivre. « Enfin, il le sera si nous le retrouvons… » Une nouvelle fois, elle s’arrête. Portant ses doigts à sa bouche, elle siffle de manière sonore dans l’espoir qu’il entende son appel. Après tout, il avait été dressé au Monastère voilà quelques années et son mentor aux écuries avaient habituées toutes ses montures à cet appel. De nouveaux quelques bonds pour rattraper l’allure rapide du guerrier « Si vous ne voulez pas faire le détour, soit. Mais vous serez ennuyé par ce son tout le trajet car s’il est dans le coin, il viendra à nous. » Gabrielle glisse une mèche blonde derrière son oreille tout en marchant. « Car la ville la plus proche épargnée par les brigands est le village dont je viens. Le village des Saints. Sans cheval, il est certain que nous n’arriverons pas avant la nuit. »

Gabrielle parle beaucoup. Elle essaie de noyer ses pensées par des mots triviaux quand elle aurait pu se contenter d’aller à l’essentiel. Mais Gabrielle a les flash de l’attaque du monastère, elle revoit la violence et le sang. Elle ne peut penser qu’à ça. Alors elle tente de se distraire comme elle peut, quitte à engager la conversation avec celui là même qui a causé ces réminiscences. Après tout, si elle veut devenir chevalier, elle devra apprendre à les maîtriser. Alors elle les ignore du mieux qu’elle peut, détournant sa propre attention. Mais aussitôt ses pensées reviennent sur les mots de l’homme en armure et son analyse du monde. Elle ne peut pas s’en empêcher. Au moins peut-elle feindre d’être forte, d’être douce. « Vous savez, je pense que vous avez tort. » Elle hésite à le reprendre réellement, de peur de sa réaction. « Sur le monde qui ne serait pas tout rose. Je ne pense pas qu’il soit si sombre que vous le décrivez. » Elle cherche ses mots quitte à en trébucher sur les syllabes. « J’ai vu sa noirceur, au monde, quand… et bien, ce qu’il s’est passé au Monastère n’est un secret pour personne. » Elle lutte contre les flash et les souvenirs. Gabrielle est fière d’y parvenir. Courageuse. « Mais il existe aussi de la bonté en ce monde, et la rédemption. Je l’ai vue de mes propres yeux. Si on leur donne de la patience, les gens peuvent changer, j’en suis persuadée. »  Elle lui adresse un sourire lumineux avant de reprendre. « C’est pourquoi je ne vous en veux pas pour… » Des flash, encore. L’homme en armure qui essuie son épée avant de la rengainer. Les corps sans vie. Non. Oublie ça, Gabrielle. Chasse les de tes pensées. « ...ce que vous avez fait. Même si je ne suis pas d’accord. Vous avez votre chance. » Elle soupire, fière de ce qu’elle a dit. Des paroles dignes de la sœur qui l’a élevée, sans aucun doute. D’expérience, elle sait qu’il ne faut pas insister s’il ne relève pas. Aussi garde-t-elle le silence avant de siffler de nouveau pour appeler son cheval.

Nerveuse, Gabrielle joue avec une mèche de ses cheveux en regardant le paysage tandis qu’elle bondit presque pour rattraper les grands pas de l’homme en armure. « C’est encore loin, à pied, en effet. Nous n’y serons pas avant la nuit si nous ne trouvons pas mon cheval. » Elle soupire légèrement, anxieuse à l’idée de ne pas retrouver Ymir, son cheval préféré des écuries du village. Il s’agit d’un cheval gigantesque – bien trop grand pour elle – et capable de supporter des charges imposantes tout en bénéficiant d’une endurance certaine. Elle s’était occupée de lui pendant de plusieurs années car il avait survécu à la tragédie du Monastère trois ans plus tôt. Aussi existait-il un lien sentimental entre les deux êtres ; Ymir n’était pas un cheval comme les autres pour Gabrielle. Elle s’apprête à siffler de nouveau avant de se raviser, se remémorant les paroles finalement sage de son compagnon de voyage. Elle n’y gagnerait rien de plus qu’attirer tous les bandits des environs. Déçue, elle poussa un soupir dans lequel on pouvait ressentir sa déprime. « J’espère qu’il ne fera pas de mauvaise rencontre… »

Ensuite, l’homme en armure revient sur le discours bien utopique qu’elle lui a déclamé. Bien évidemment, il n’y adhère pas ; elle n’avait pas espéré le contraire. Même si elle ne s’était pas fait d’illusions, elle est malgré tout blessée par ses paroles. Il ne la ménage pas et ne cherche d’ailleurs pas à le faire. Si elle a reporté ses yeux vers lui quand il a repris la parole, elle les détourne bien vite. Il l’a piquée au vif. Si son instinct lui crie de ne pas insister, la ligne morale qu’elle s’impose lui dicte le contraire. Un peu effrayée, elle décide de poursuivre cette conversation fâcheuse sans le laisser avoir le dernier mot. « Je ne suis pas une enfant, » une simple correction pour commencer, même elle laisse transparaître son agacement. Gabrielle est vexée. « Et bien sûr, je sais que le monde n’est pas parfait, loin de là. Mais est-ce une raison pour se comporter comme une ordure soi-même ? » Elle prit une inspiration tremblante pour se donner du courage. « Je ne m’attends pas à ce que vous compreniez mais j’ai foi en chacun. Vous y compris. » De nouveau, elle tourne son visage dans la direction de l’homme en armure pour lui adresser un sourire timide mais solaire. Mais il mentionne de nouveau les morts et son regard ne peut plus que s’arrêter sur les traces de sang qui maculent l’armure. Prenant sur elle, Gabrielle remonte son regard vers le heaume de l’homme bien qu’elle ne puisse distinguer ses yeux ou son expression. « J’ai foi en vous parce que vous m’aidez. Si vous étiez si mauvais que vous le dites, il y aurait déjà une tombe pour moi à l’heure qu’il est, dans ce cimetière. C’est pour cela que je pense qu’il y a du bon en vous. » Elle retient comme elle peut les tremblements qui menacent d’assaillir son corps tout entier. Gabrielle a terriblement peur que ses paroles aient pu le provoquer ou lui inciter à ajouter la tombe dont elle parle dans le cimetière. Néanmoins, elle prend sur elle et insiste. « Gabrielle, » articule-t-elle dans un sourire doux. « Pour inscrire sur ma tombe. » Elle détourne rapidement le regard, intimidée par la réaction que pourrait avoir l’homme en armure. Au moindre geste, elle est prête à prendre ses jambes à son cou mais a peur de ne pas être assez rapide. Elle essaierait néanmoins. Quant à sa question sur la direction qu’avait emprunté le cheval, Gabrielle se contenta de la lui montrer du doigt. Elle avait bien assez parlé, pour le moment. Tu es brave, Gabrielle.