Souvenirs flous. Mémoires détruites. Flammes. C’est tout ce dont Rosalina se souvient quand on lui parle de sa jeunesse. Rien d’autre ne lui vient. Uniquement des formes indisctinctes, impossible à comprendre ou à appréhender, d’une manière ou d’une autre. Elle ne se souvient que d’une seule chose.

L’odeur du sang.

Quelque chose de dérangeant. Quelque chose qui ne plaît pas. Une violente odeur nauséabonde. Et la sensation amère de sentir des larmes couler le long de ses joues. Rosalina n’aime pas repenser à tout ça. Elle préfère oublier, le laisser derrière. C’était ce qu’elle pensait, jusqu’à il y a peu.

L’histoire de Rosalina est simple. Elle est violente. Noble originaire de Faerghus, famille perdue dans une Tragédie dont on taira le nom – personne n’a envie de se rappeler de ce genre de choses – et une terrible odeur depuis une nuit atroce, voilà ce que celle dénommée Eilis racontera à chaque fois. C’est ce qu’elle a vécu, c’est ce qu’elle raconte. La perte de sa famille entière, décimée par des personnes dont elle n’a même pas un simple souvenir. Pas un visage. Pas une cagoule. Pas un blason. Rien du tout. Des personnes qu’elle haït au plus haut point. Parce que plus tard, elle a découvert la vérité.

Plus tard, elle a rejoint l’Église de Seiros. Ce sont eux qui lui ont donné un sens à sa vie. Ou plutôt, qui le lui ont redonné. Elle a fait ses preuves. Maniant aussi bien l’épée que la lance, elle a rapidement montré à tous ce dont elle était capable. Dangereuse avec une lame entre les doigts, Rosalina s’est rapidement fait un nom dans les Chevaliers de Seiros, et a commencé à en faire partie. Depuis, elle tend son épée au nom de l’Église, au nom de la Déesse.

Et cette année a tout chamboulé. Une force sombre menaçait ce en quoi elle croyait. Ceux qu’elle aimait. Et il s’est vite avéré que ceux qui attaquaient désormais étaient ceux qui avaient attaqués la première fois. Alors Rosalina a saisi son épée. Et elle s’est battue avec hargne. Ce soir-là ils ont perdu. Ils n’ont pu défendre le Monastère. Ils l’ont perdu. Mais Rosalina n’a jamais abandonné. L’héritière et seule représentante de la famille Vestoria avait encore son mot à dire.

Alors quand la guerre a repris, elle a commencé à combattre contre l’Empire. Contre ceux qui les attaquaient, qui les menaçaient. Elle a combattu vaillamment. Pendant ces trois longues années qui ont rougi les terres de Fodlan.

Et cette odeur de sang qui ne veut toujours pas s’en aller. Odeur désagréable et nauséabonde qui emplit ses narines, au même titre que l’air qu’elle respire.

Mais au bout d’un moment tout a changé. Qu’est-ce qui a changé ? Bonne question. Mais quelque chose a changé. L’Empire a demandé une trêve. Rosalina était contre. Elle ne voulait pas l’accepter. Mais elle savait que, depuis le début, quelque chose n’allait pas. Avait-elle finalement raison ? Probablement.

Mais elle était sûre d’elle, et prête à se battre encore pour l’Église. Ceux qui l’ont recueillie. Ceux qui l’ont aidée. Ceux qui lui ont donné une raison de vivre.

Et ceux qui donnent un sens à son existence.

Rosalina est une des puissantes de ce monde. Debout, quand elle marche, elle ne regarde jamais derrière elle. Forte, levant les bras et criant aussi fort qu’elle le peut, elle guide les foules avec aisance et avec caractère. Elle est charismatique, Rosalina. Elle n’est pas une simple noble de Faerghus. Elle est une créature douce et puissante en même temps. Capable d’offrir l’amour d’une mère, comme le tranchant d’une lame si vous avez dit quelque chose qu’elle n’a pas apprécié. Parce que Rosalina est une personne directe et franche. Et si quelque chose chez vous la dérange, elle n’hésitera pas une seule seconde à le dire. Elle est violente. Elle est forte.

Mais tout ça cache un côté bien plus calme et doux. Elle peut offrir de l’amour, de celle qui lui manque tant aujourd’hui. Une mère, ce serait tout ce qu’elle aurait à demander. Solitaire – mais pourtant n’apprécie pas la solitude – elle est paradoxale. Elle n’aime pas le mensonge, pourtant passe sa vie à mentir. Elle n’aime pas l’hypocrisie, pourtant elle est une des femmes les plus hypocrites que l’on connaisse. Elle n’aime pas vivre. Pourtant, elle vit.

Elle aurait peut-être préféré que tout s’arrête plus tôt. C’était le cas, jusqu’à ce qu’elle apprenne l’existence de ceux qu’elle méprise au plus haut point. Ceux qui la terrifient, en plus de l’enrager. Sauvage lionne, elle combattrait férocement tous ceux qui se mettent entre elle et sa justice. Entre elle et ce qu’elle croit être la chose à faire. Défendre l’Église. Défendre ceux qui lui ont ouvert les yeux, et offert un sens à sa vie.